Les effets inattendus du virus
Les impacts économiques de la pandémie sont encore difficiles à mesurer, le virus circulant encore activement dans de très nombreuses zones sur la planète. De nombreuses statistiques alarmantes sont véhiculées par les médias.
L’Europe et les Etats-Unis sont en récession et les anticipations des économistes sur les scenarii de reprise sont à ce jour très divergents. Les conséquences de cette épidémie mondiale sont pour certains inattendues.
La Chine a été à l’origine de cette crise sanitaire et de fait, le premier pays à sortir de la crise économique qui en a résulté. La Chine est la première grande économie à renouer avec la croissance. Son PIB a connu une croissance de 3,2% au 2ème trimestre après une chute historique de 6,8% au 1er trimestre. D’un trimestre à l’autre, la croissance rebondit de 11,5%. Avec ces chiffres, la Chine sera, sauf reprise de l’épidémie et rechute de l’économie, la seule grande économie mondiale à enregistrer une croissance positive en 2020. Selon le FMI, cette croissance devrait avoisiner les 1% alors que pour les autres grandes économies la baisse du PIB devrait être proche de 8%.
L’observation de cette reprise économique fait apparaître plusieurs éléments. On constate que l’offre a redémarré plus rapidement que la demande. La production a progressé en juin de 5% sur un an. L’Etat chinois a soutenu l’activité industrielle.
En revanche, la demande reste atone. Les ventes de détail étaient encore en baisse de 1,8% en juin sur un an (11,4% sur le semestre). La consommation est freinée par les baisses de salaires et les licenciements. En outre, les exportations chinoises ne peuvent pas se substituer à cette faible demande intérieure en raison de la chute des économies européennes et américaines. Les grands clients de la Chine sont encore fortement affectés par l‘épidémie. Celle qui apparaît comme la grande gagnante de cette crise affiche cependant de nombreuses fragilités : tensions avec les USA, reprise de l’épidémie et surtout forte remontée du chômage avec des chiffres officiels qui ne reflètent pas la réalité de la situation (5,7% en juin).
L’Etat chinois et ses dirigeants ont des objectifs clairs ; cette pandémie lui permettant d’avoir un rôle décisif dans certaines zones géographiques considérées comme stratégiques. Les velléités d’hégémonie de l’Empire du Milieu, même si elles existaient avant le Covid-19, se sont renforcées, c’est un des effets secondaires de la pandémie.
Autre conséquence que l’on peut observer : la montée des inégalités sur tous les continents et plus particulièrement aux Etats-Unis.
La baisse du PIB entraine outre atlantique une montée de la pauvreté et cela s’ajoutant à des tensions raciales majeures, on constate une réelle déstabilisation de la société américaine. Cela aura-t-il un impact sur l’élection présidentielle ?
Cet accroissement des inégalités est également flagrant en Chine où elle résulte avant tout de la forte progression de la richesse des classes dirigeantes supérieures et moyennes. Le concept d’une dictature tournée vers un capitalisme débridé laisse de côté une frange de la population qui vit encore en-dessous du seuil de pauvreté.
En Europe, malgré des aides sociales significatives, l’augmentation du chômage accentue les inégalités et les tensions sociales risquent de surgir rapidement. Comme sur tous les continents, les gouvernements en place risquent d’être critiqués sur leur gestion de la crise.
Parmi les effets inattendus de cette pandémie, il faut également tenter de comprendre ce qu’il se passe à Wall Street.
Depuis mi-août, l’indice S&P 500 a dépassé son niveau de février. Il a ainsi repris plus de 50% depuis le creux du mois de mars. Cette spectaculaire reprise des marchés financiers est décorrélée de l’économie réelle. Pour autant cette hausse est propre au marché américain et ne s’est pas manifestée en Europe dans les mêmes proportions.
Les places boursières européennes sont à la traine. Seul le DAX est très proche de ses niveaux d’avant crise (-2,5%) alors que l’indice CAC 40 est encore en baisse de plus de 15%. Depuis plusieurs semaines, l’indice boursier français stagne autour de 5000 points.
Ce rebond aux Etats-Unis peut s’expliquer par le montant du soutien à l’économie mis en place par le gouvernement américain et surtout par l’expansion de la base monétaire qui selon le FMI atteindrait 8,5% du PIB outre-atlantique alors que les liquidités injectées par la BCE se monteraient à 1,7% du PIB de la zone euro seulement.
`A noter que le dernier discours du directeur de la Réserve Fédérale américaine, Jerome Powell est très rassurant pour les marchés : il indique en effet que quelle que soit l’évolution de l’inflation dans les mois à venir, les taux d’intérêt à court terme seront maintenus à des niveaux très bas afin de permettre un redressement durable de l ‘économie américaine et un retour rapide au plein emploi.
Un autre facteur constitue également un élément explicatif de ce décalage entre les marchés américains et européens ; les GAFAM que sont les géants de l’internet (Google, Apple, Amazon, Microsoft, etc…) ont très largement contribué à la hausse des marchés américains. Leur capitalisation boursière représente désormais plus de 25% de l’indice S&P 500. La pandémie a accéléré la digitalisation de l’économie et ces entreprises en profitent largement mais l’engouement des petits épargnants pour les action de ces sociétés a propulsé leur valorisation sur des niveaux très élevés (+/- un multiple de 25 fois leurs bénéfices 2021) qui les rendent très vulnérables à un retournement .
La crise du Coronavirus a des conséquences économiques majeures mais d’autres effets secondaires fragilisent l’équilibre géopolitique de la planète et redistribuent les cartes des grands équilibres entre secteurs économiques et entre pays.