Ralentissement de la croissance : quel impact sur les marchés ?
La croissance mondiale n’a pas dépassé 3 % en 2019, soit son rythme le plus faible depuis la crise financière de 2009 (contre 3,6 % en 2018).
L’économie mondiale pourrait enregistrer un léger rebond cette année — si tout va bien. Cependant de nombreux obstacles peuvent se dresser parmi lesquels celui imprévisible d’un ralentissement marqué en Chine et dans d’autres pays du continent asiatique en raison d’une épidémie affectant pour le moment plus particulièrement ce continent.
L’impact de cette épidémie sur l’économie sera dix fois plus important que celui du SRAS”, estime l’économiste chinois Teng Tai. En pleine période de Nouvel An chinois, partout dans le pays, les festivités sont annulées, les entreprises sont à l’arrêt, les gens ne prennent pas les transports en commun, des villes entières sont mises en quarantaine, les routes sont bloquées, les vols suspendus, et toute la logistique est hors service.
Les secteurs les plus touchés sont le tourisme, le commerce et le transport. La consommation est également affectée, or par rapport à 2003 (SRAS) celle-ci représente à présent près de 57% du PIB de la Chine.
S’il est pour l’heure trop tôt pour mesurer l’impact du coronavirus sur l’économie mondiale, selon le FMI, de nombreuses entreprises internationales sont exposées à des conséquences pénalisantes pour leur activité du fait de l’importance de la Chine, tant comme marché que comme pays producteur. Depuis l’époque du SRAS, la part de l’économie chinoise dans l’économie mondiale a triplé (18% du PIB mondial). Ce qui veut dire que l’effet de contagion sur les autres économies risque d’être beaucoup plus important et rapide. De plus, l’épidémie survient alors que la machine économique chinoise est déjà en train de ralentir.
Pour soutenir l’économie de tout un pays ébranlé par le coronavirus la banque centrale chinoise a annoncé dimanche qu’elle injecterait l’équivalent de 156 milliards d’euros à son économie.
Les inquiétudes pèsent sur la reprise de la production industrielle alors que les vacances ont été prolongées jusqu’au 9 février par les autorités pour prévenir des déplacements de population susceptibles d’accélérer la diffusion de la maladie.
La crise nourrit également l’inquiétude des entreprises étrangères dont beaucoup réduisent leurs activités.
Sans sous-estimer les risques que le ralentissement chinois fait peser sur l’économie mondiale on constate également d’autres talons d’Achille dans la croissance : le gonflement sans précédent de la dette dans le monde (voir lettre de conjoncture de Janvier 2020) et le ralentissement prolongé de la croissance de la productivité.
Le rythme décevant de la croissance mondiale s’explique en partie par le ralentissement généralisé de la croissance de la productivité observé au cours des dix dernières années
D’autres raisons plus structurelles sont mises en avant pour expliquer ce ralentissement, à savoir la démographie vieillissante dans les économies avancées.
Pour 2020, le FMI anticipe une légère accélération (à 3,4 %), soutenue par les pays émergents, tandis que dans le même temps l’activité devrait être moins dynamique dans un groupe de pays comprenant le Japon, les Etats-Unis, l’Europe et la Chine, soit la moitié du PIB mondial.
Les tensions politiques risquent d’être un des thèmes majeurs en 2020, une situation face à laquelle les analystes attendent de voir si les gouvernements vont prendre le relais de banques centrales se trouvant à court de munition
Au-. delà des soubresauts liés aux litiges commerciaux lancés par Washington, un ralentissement économique en Chine et le dossier du Brexit, l’élection présidentielle américaine va occuper les observateurs tout au long de l’année.
Par ailleurs, rappelons que les grandes banques centrales ne disposent que de peu de munitions. La Réserve fédérale américaine (Fed) a en effet baissé trois fois ses taux directeurs en 2019 et la Banque centrale européenne (BCE) a réactivé son programme de rachat dette.
Les taux de dépôt négatifs ont contribué à l’augmentation des exportations par le biais de la dépréciation de l’euro, mais ils entraînent une perturbation des marchés financiers et un affaiblissement des institutions financières et bancaires.
Les gouvernements des grandes puissances économiques mondiales se retrouvent désormais face à des choix politiques majeurs : ils doivent prendre le relai des banques centrales afin de soutenir un niveau de croissance suffisant pour éviter des défaillances d’autres Etats ou d’entreprises qui pourraient conduire à une nouvelle crise financière de grande ampleur.
La solution serait de mettre en place une relance cyclique via une politique budgétaire adaptée. Les gouvernements devront peut-être assumer une partie du fardeau en augmentant les dépenses ou en réduisant les impôts, voire en conjuguant les deux approches. Plusieurs Etats sont hésitants et ne veulent pas prendre le risque de détériorer l’équilibre de leurs finances publiques.
Sur les marchés financiers, l’année qui débute devrait être plus heurtée que 2019. D’importants événements politiques, y compris la candidature du président américain Donald Trump en vue d’un second mandat, seront scrutés par les acteurs du marché. Cela aura un impact conséquent sur la prise de risque, le sentiment oscillant entre les classes d’actifs plus risquées et les classes d’actifs plus « sûres ».
La valorisation des actifs devrait retrouver tout son sens. Le ralentissement de la croissance n’épargnera pas certaines entreprises qui pourraient subir un affaissement de leur marge Les valorisations sont désormais élevées, en particulier aux Etats-Unis, et le potentiel de hausse plus faible surtout si on envisage une baisse sensible des marges des entreprises.
Certains actifs risqués restent cependant attractifs en raison d’un retard pris en 2019.
Alors que les valorisations des sociétés non cotées se sont envolées au point de voir les valorisations des entreprises non cotées dépasser désormais celles des sociétés cotées en Bourse. Le créneau des petites et micro capitalisations accuse un retard et même si une décote semble justifiée par rapport aux grandes capitalisations, elle semble plus difficile à expliquer par rapport au Private Equity.
Les petites entreprises cotées offrent souvent l’intérêt de détenir une position phare sur un marché de niche et de pouvoir ainsi bénéficier d’un réel Pricing Power garantissant à l’investisseur la maîtrise de sa croissance.
En matière d’actifs détenant un potentiel de croissance, les fonds thématiques peuvent également présenter un réel intérêt. La sélection des entreprises répond à une problématique spécifique qu’elle soit technologique, sociologique ou environnementale.
Bien qu’étant liées aux fluctuations du marché, ces entreprises présentent un réel potentiel de croissance à long terme qui leur confère la capacité de surperformer leur marché domestique.
La croissance mondiale risque d’être mise à mal cette année mais les actifs risqués sélectionnés avec rigueur seront probablement générateurs de rendement.
Les Banques centrales poursuivront leur politique de taux bas et injecteront des liquidités pour soutenir les économies mondiales.