La Chine comme pilier de la croissance mondiale : l’Histoire se répète…

La Chine est une puissance très ancienne. Elle est l’héritière de l’une des plus anciennes civilisations connues de l’humanité. Selon le sinologue réputé Timothy Brook « c’est en Chine entre les XIIIè et XVIIè siècle que s’est forgé le premier monde moderne ». A cette époque, le commerce mondial se concentrait autour de l’Empire du Milieu.

A l’époque de la dynastie Ming (1368-1644), la Chine était le centre manufacturier du monde.

Elle produisait des biens de bonne qualité et les vendait au plus bas prix. Elle représentait le centre de l’économie mondiale, était à l’écoute des besoins du monde et savait adapter ses unités de production et son transport.

Cette puissance économique de la Chine résultait de nombreux facteurs tels que la route de la Soie, une marine de près d’un million de personnes, des avances technologiques (boussole, poudre à canon, etc..) et institutionnelles (bureaucratie structurée).

Dès la fin du XVIIè siècle, avec la dynastie Qing, la Chine se replie sur elle-même et laisse la place à l’Europe qui impose à partir du XIXè siècle une domination technologique grâce à deux révolutions industrielles.

Seule ouverture de la Chine, l’opium britannique inonde le marché chinois et créer des problèmes sociologiques majeurs qui entrainent une interdiction des importations par l’Empereur et la première guerre de l’Opium entre la Chine et certains pays européens.

La défaite de la Chine se traduit par une série de traités illégaux imposés par les Etats européens qui marquent ainsi leur volonté colonialiste.

La Chine entame une phase de déclin économique marquée par des bouleversements politiques majeurs (révolution chinoise et instauration d’une dictature communiste) dont elle ne se relèvera pas avant la mort de Mao Zedong en 1976 et la fin de l’économie planifiée mise en place par Deng Xiaoping (numéro 1 de la République Populaire de Chine de 1978 à 1992). Rappelons qu’en 1978, début des réformes, le PIB/habitant était de 158 $.

Après 1978, on assiste à des transformations en profondeur du système économique et une forte accélération de la croissance économique. En 1980, la Chine devient membre de la Banque Mondiale et du FMI. En 2001, elle est admise au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce. En quelques décennies, la Chine a retrouvé une place de choix au sein de l’économie mondiale.

A son apogée entre 2005 et 2010, la croissance chinoise vient de connaître son résultat le plus décevant en 2020 en raison de la pandémie. Toutefois cette hausse du PIB de 2,3%, si elle semble modeste à l’échelle de ce pays, reste néanmoins le seul taux de croissance du PIB positif en 2020 dans le monde.

A l’heure du 100è anniversaire du parti communiste chinois et de la célébration de la puissance chinoise et du président Xi Jinping, le pays retrouve en partie son aura passée.

Si la Chine a été le premier pays touché par la Covid-19, ses mesures rapides et strictes ont permis de contrôler rapidement sa propagation. Le premier trimestre de cette année affiche une croissance record de 18% du PIB. Sur la même période, il y a un an, le PIB avait baissé de 6,8% (la plus faible performance en 44 ans). Ce chiffre doit donc être relativisé, étant principalement lié à la base de comparaison très basse de début 2020.

En analysant plus précisément cette progression du PIB, on constate qu’elle résulte en grande partie de la reprise des exportations (produits électroniques, équipements médicaux…) alors que la consommation des ménages est encore affectée par un marché du travail pénalisé par le chômage. Officiellement, le chômage en Chine s’élève à 5,3% au mois de mars mais ce chiffre ne tient pas compte d’environ 300 millions de travailleurs ruraux qui viennent travailler dans les zones urbaines et qui ont été très fortement impactés par la Covid.

En novembre 2020, le gouvernement chinois a annoncé la disparition de l’extrême pauvreté bien que l’on puisse constater un creusement continu des inégalités.

Au cours de cette pandémie, les autorités chinoises ont choisi de privilégier l’aide aux entreprises et les consommateurs chinois, en raison de la faiblesse de la protection sociale, ont préféré épargner pour pouvoir payer leurs frais de santé et assurer leur retraite. Le taux d’épargne en Chine est proche de 40% (35% en 2019).

La consommation, qui a progressé depuis l’été 2020, est un reflet des inégalités ; en effet, les ventes au détail de biens de luxe ont augmenté de 20% sur le dernier trimestre 2020 marquant un fort écart entre la nécessité d’épargner d’une très large frange de la population et les revenus élevés tirés d’investissements d’une petite partie de la population urbaine.

Plusieurs économistes et responsables chinois prônent une politique économique plus active dans le soutien de la demande intérieure.

La Chine doit désormais faire face à deux facteurs importants qui peuvent fragiliser sa croissance.

Le premier est démographique. Le taux de fécondité est en chute libre et s’établit désormais à 1,3 enfant par femme. En raison de la politique de l’enfant unique et de la préférence pour les garçons, le nombre de femmes en âge de procréer est bas et cette tendance va s’accentuer avec un recul anticipé des femmes de 20 à 35 ans dans les dix prochaines années.

La population de la Chine va entrer dans une phase de déclin avant 2025. Cela pourrait avoir des conséquences négatives sur la consommation et donc peser sur la croissance économique globale.

Le deuxième facteur est lié aux engagements pris par le gouvernement en matière d’émissions de CO2, l’objectif étant d’atteindre la neutralité carbone en 2060.

Cet engagement pourrait être lourd de conséquences pour l’économie chinoise. En effet, ce pays a structuré son industrie autour du charbon et de productions particulièrement consommatrices en énergie telles que l’acier, l’aluminium, le ciment…

Pour réussir ce pari audacieux, il sera probablement nécessaire de réorienter l’économie vers une part plus importante de services, revoir les infrastructures, modifier les modes de consommation, adapter les villes et l’habitat et cela devra se faire sans déstabiliser le niveau de vie du consommateur chinois, au risque de devoir faire face à des mouvements sociaux préjudiciables à la stabilité politique.

On le constate, la Chine retrouve actuellement un rôle déterminant dans l’économie mondiale. Selon certains économistes, elle pourrait même retrouver son rang de première économie mondiale, qui était le sien quelques siècles en arrière, d’ici 20 ans avec un PIB global supérieur à celui des États-Unis même si le niveau moyen par habitant restera proche du tiers de celui d’un habitant des États-Unis.

Dans les prochaines années, la Chine devra faire face à des enjeux démographiques, écologiques, sociaux, politiques et géopolitiques majeurs.

Ses réponses à ces questions lui donneront ou pas la possibilité de retrouver un premier rôle actif au sein de la communauté internationale.

Si sur les marchés financiers, l’influence de la Chine est déjà significative, il ne faut pas exclure que le rôle de marché directeur, aujourd’hui tenu par les États-Unis en raison, entre autres, de la place du dollar comme monnaie de référence, revienne bientôt à la Chine en tant que moteur de la croissance mondiale. Le marché chinois est dès à présent un pôle incontournable dans une allocation d’actifs.