Nous présenterons ici quelques particularités choisies, liées à la donation-partage :
1 / La donation-partage peut porter sur des droits démembrés, par exemple donation de l’usufruit à un enfant et de la nue-propriété à l’autre.
Dans ce cas chaque valeur est déterminée en fonction de l’article 669 du CGI au moment de la donation.
Ces valeurs sont en principe figées, donc au décès du donataire …
- L’usufruitier rapporte sa valeur en usufruit
- Le nue-propriétaire rapporte sa valeur en NP
… pour le calcul des réserves et la réunion fictive.
2/ La donation-partage n’est pas obligatoirement égalitaire. Elle peut prévoir par ailleurs des soultes pour rétablir l’égalité si le donateur le souhaite. L’un des donataires peut tout à fait n’être allotis que par une soulte payable immédiatement ou à terme.
Nb : en cas de soulte, le calcul des droits de mutation se fait sur les droits dit « théoriques » des donataires. Ainsi par exemple, en cas de donation-partage de titres d’une société à un enfant avec soulte au profit des autres enfants, permettant ainsi la transmission anticipée d’une entreprise à un enfant précis sans rupture d’égalité, l’exonération partielle Dutreil profitera à tous les enfants, quand bien même un seul recevrait effectivement l’entreprise.
En cas de donation-partage avec soulte, l’engagement individuel de conservation des titres doit être souscrit par le bénéficiaire effectif des titres, ceci indépendamment des modalités de calculs des droits de donation, lesquels ne sont pas liquidés directement sur les biens attribués à chaque donataire mais en fonction des droits théoriques de chaque donataire dans la masse donnée et à partager.
Dans l’hypothèse envisagée d’une donation-partage avec soulte de titres bénéficiant de l’exonération partielle prévue à l’article 787 B du CGI, les règles traditionnelles de liquidation des donations-partages avec soulte sont applicables. Ainsi, dans une telle hypothèse, la liquidation des droits est effectuée selon les attributions théoriques. Cependant, c’est bien entendu le bénéficiaire effectif des titres de l’entreprise qui devra souscrire l’engagement individuel de conservation (RM Vachet n° 81926, JO AN du 28 mars 2006, p. 3343).
BOI-ENR-DMTG-10-20-40 n°340.
3 / La donation-partage n’est certes pas rapportable, mais il n’en demeure pas moins qu’elle s’impute sur la réserve héréditaire (sauf clause contraire) comme toute donation. Les donations étant en principe en avancement de part successorale. Elle sera par ailleurs prise en compte pour le calcul des réserves (réunion fictive des donations antérieures). Voir notre article : L’impact des donations dans la succession.
4 / La donation-partage peut reprendre une donation-antérieure (et d’ailleurs elle peut très bien ne servir qu’à ça). Elle peut également permettre de faire un changement d’attributaire [1].
Dès lors, il semble possible de prévoir une incorporation et de faire une nouvelle distribution des biens donnés qui peuvent ainsi être attribués à un autre que le donataire d’origine[2]
Article 1078-1 CC : « le bien réincorporé peut être attribué, en totalité ou en partie, soit à l’auteur du rapport, soit à un autre copartageant ».
C’est en outre envisagée par le CGI (art. 776 A) pour la donation-partage transgénérationnelle.
Dans ce cas, les biens déjà donnés ne sont pas soumis aux droits de mutation à titre gratuit (DMTG) car ils l’ont déjà étés, même si le bien en question a pris entre temps de la valeur. La nouvelle valeur sera bien prise en compte et figée, et donnera par contre lieu au paiement du droit de partage (2,5%).
Alors que s’il s’agit d’un nouveau bien, c’est l’inverse : paiement de DMTG mais pas de droit de partage si la donation et le partage sont réalisés dans un même acte.
5 / La donation-partage implique un partage, et donc pas d’indivision au risque qu’elle soit requalifiée en donation simple. Toutefois l’indivision est autorisée pour les donations-partage transgénérationnelles (art. 1078-4 al 2). Cela permet des attributions indivises au sein d’une souche mais pas entre les souches.
6 / La donation-partage peut avoir comme donataire un tiers (membre de la famille autre qu’un présomptif héritier ou personne étrangère à la famille) dans le cas unique de la transmission d’une entreprise.
7 / La donation-partage sera valable même si tous les descendants ne sont pas donataires. Toutefois, les valeurs ne seront plus figées et seront réévaluées au jour du décès.
[1] Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 15 janvier 2014, 11-18.693 12-29.267 : Mais attendu qu’ayant exactement retenu que l’article 1078-1 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 23 juin 2006 et applicable en la cause, n’interdit pas qu’un bien antérieurement donné indivisément à des enfants soit attribué à l’un d’eux dans un acte de donation-partage.
[2] Michel GRIMALDI : En dépit du silence de la loi, on admet que la libéralité-partage peut attribuer le bien à un autre qu’au donataire originaire. L’administration fiscale suit : elle taxe l’opération au simple droit de partage (Instr. 11 avr. 1974 : Defrénois 1974, art.30663), alors même que la permutation porte sur un bien acquis en emploi ou en remploi du bien donné (Rép. min. 14 août 1976 : Defrénois 1976, art. 31236). Un arrêt semble valider l’opération (Cass. 1re civ., 15 janv. 2014, n° 11-18.693 : JurisData n° 2014-002761 ; D. 2014, 1914, obs. M. Nicod : « l’article 1078-1 du Code civil n’interdit pas qu’un bien antérieurement donné indivisément à des enfants soit attribué à l’un d’eux dans un acte de donation-partage »).