En France, certains régimes fiscaux apparaissent particulièrement complexes, avantageux et parfois même inadaptés à notre époque.

Plusieurs de ces régimes fiscaux font l’objet de discussions parfois récurrentes, parfois nouvelles, mais dont l’issue est toujours incertaine. Or, conseiller et suivre son client et sa famille c’est aussi savoir regarder vers quelle direction tourne le vent.

L’instabilité fiscale n’est plus à démontrer, notre fiscalité est en mouvance constante et chaque loi de finance, chaque nouveau gouvernement ou chaque nouvelle élection, est une source de modifications fiscales.

De plus, les mutations de notre société doivent être prises en compte et même si cela peut prendre du temps pour avoir une concrétisation législative, les discussions et rapports ne manquent pas.

Toutefois, certains sujets apparaissent particulièrement récurrents ou suffisamment légitimes pour qu’ils soient regardés avec attention.

Prenons quelques exemples :

La location meublée : le régime fiscal de la location meublée, connu des praticiens pour être d’une complexité rare, offre des avantages nombreux mais surtout incohérents. Le régime fiscal applicable aux revenus est celui des BIC, avec possibilité d’amortir. Mais, contrairement à tous les autres biens utilisés ou exploités pour générer des revenus imposables dans un tel cédule, la cession sera imposable en plus-value immobilière sans reprise des amortissements pratiqués (alors qu’en principe les amortissements sont repris pour le calcul de la plus-value professionnelle). Pour simplifier le tout, le régime est encore différent au sens ISF/IFI. Il est possible qu’un bien loué meublé soit professionnel au sens de l’IR, mais pas au sens IFI, ou inversement. Nous n’évoquerons pas les différences existantes encore selon qu’il s’agit, d’un point de vue social, d’une location de courte durée ou non etc. Ni des problématiques rencontrées pour l’application du régime fiscal Dutreil, ou du remploi de cession de l’article 150 O B Ter (voir notre article : Quelques rappels sur la location meublée).

La location meublée est régulièrement au centre de discussions notamment pour mettre fin à ce décalage fiscal entre le principe de l’amortissement déductible fiscalement et l’imposition de la cession sans reprise de ce dernier.

Dernièrement (janvier 2018), c’est le Conseil des Prélèvements Obligatoires qui, dans un rapport sur les prélèvements obligatoires sur le capital des ménages, préconise une modification du régime actuel :

« Par ailleurs, l’écart de traitement fiscal entre la location nue (imposée dans la catégorie des revenus fonciers) et la location meublée non professionnelle (imposée en bénéfices industriels et commerciaux) crée une distorsion significative de marché . Bien que résultant d’une jurisprudence administrative ancienne selon laquelle la location meublée est une activité commerciale, la possibilité d’amortir le bien fiscalement a pour effet d’augmenter artificiellement la rentabilité d’un investissement dans le meublé de l’ordre d’un à deux points, pour une rentabilité moyenne de l’ordre de 4 % dans le meublé (2 % dans le nu). »
« Le régime de la location meublée est plus avantageux en ce qu’il permet de déduire des loyers perçus, au régime micro-BIC, un abattement forfaitaire représentatif des charges à hauteur de 50 %, et même 71 % pour les gîtes ruraux et les meublés de tourisme, alors que l’abattement n’est que de 30 % au régime micro foncier qui régit la location nue. De plus, le régime de la location meublée non professionnelle ouvre la possibilité de déduire, au réel, en plus des charges, un amortissement qui n’est ensuite pas réintégré dans le calcul de la plus-value imposable. »
« La fiscalité française des revenus locatifs est la seule à distinguer location nue et location meublée : tous les autres pays imposent selon les mêmes modalités ces deux types de revenus. »
Si le régime de la location meublée venait à être fusionnée avec celui des revenus fonciers par exemple, hypothèse qui a déjà été émise, cela s’appliquerait-il aux investissements immobiliers et locations en cours ? Nous pourrions imaginer que cela s’applique dès lors que le bail locatif prendra fin. Ce qui revient à dire, pour les locations de courte durée, que le nouveau régime s’appliquera immédiatement.
Toutefois, une fusion avec le régime des revenus fonciers semble, à notre sens, peu probable dans la mesure ou la location meublée vient juste d’être intégrée à l’article 35 du CGI. De plus, certaines de ces activités auront été transmises en profitant du régime Dutreil, lequel implique une continuité de l’exploitation sur au moins 4 ans suite à la transmission. La perte de son caractère commercial et éligible impliquerait une remise en cause des Dutreils en cours.
Cependant, la reprise des amortissements pour le calcul d’une plus-value de cession est déjà plus envisageable, c’est déjà le cas des locations meublées dites professionnelles. On pourrait alors imaginer, au moins au sens de l’impôt sur les revenus, une fusion des régimes professionnels et non professionnels : BIC et PV Professionnelle dans tous les cas.

Le régime applicable aux successions : la fiscalité des successions en France pourrait paraître avantageux par rapport à certains pays, mais il est en réalité très coûteux comparé à d’autres (Suisse, Italie, Roumanie par exemple). Toujours est-il que le rapport du CPO mentionné ci-avant relève que notre droit fiscal des successions n’est plus adapté.

Ainsi, eu égard à l’allongement de la durée de vie, la transmission du patrimoine par voie de succession semble ne plus être pertinente et pas assez taxée. De plus, la transmission favorisée en ligne directe ne permet plus de répondre aux problématiques liées aux familles recomposées. Ont donc été émis comme hypothèse une hausse de la fiscalité des succession en ligne directe, ou encore l’intégration des contrats d’assurance vie dans la succession dans tous les cas.

Le régime Dutreil : bien que non ciblé directement par le CPO, le rapport cible tout de même l’absence de contraintes réelles en comparaison avec ce que prévoient certains pays (condition de maintien de l’emploi ou de la masse salariale par exemple).

L’impôt sur la fortune et la résidence principale : diverses discussions avaient porté notamment sur la déductibilité au passif de l’emprunt lié à l’acquisition de la résidence principale à 100%, alors qu’elle profite d’un abattement de 30%.

Comme nous le voyons ces quelques exemples sont loin d’être anodins! Et pourtant, il est possible que l’avenir montre une « évolution » voire une suppression de certains régimes.

Comment prévoir cela ? Il est impossible de lire l’avenir et un changement de bord politique ou un besoin de recettes fiscales inattendu est toujours possible. De plus, la jurisprudence n’est pas en reste et doit toujours être suivie avec attention.