La TVA est un point crucial de toute activité économique. Dans le cas des holding dites animatrices de leur groupe, la problématique de la TVA doit être appréhendée de manière à pouvoir prendre en compte les particularités liées à ce régime fiscal, voire à ajuster, lorsque cela est possible, la structuration du groupe.

Comme dans tous les régimes fiscaux, la reconnaissance de l’animation d’une holding est davantage issue du constat d’une situation de fait, que de l’existence d’une structure particulière répondant à une définition juridique. En effet, la holding est avant tout une société, dont l’existence repose sur les principes édictés par le Code civil et le Code de commerce.

Cette société sera ensuite considérée comme une holding, du fait de la détention de participations dans d’autres sociétés filiales.

Enfin, elle pourra éventuellement être considérée comme une société holding animatrice au sens du Code général des Impôts, ou de la doctrine administrative. Cette animation permettra de l’assimiler à une société d’exploitation, notamment pour l’application de divers régimes fiscaux.

Par opposition, une société holding non animatrice se bornera à détenir des valeurs mobilières (actions, parts sociales) et à en percevoir les revenus. Outre la gestion d’un patrimoine mobilier, elle permettra de profiter d’un effet de levier juridique et financier.

Toutefois, la notion même de holding animatrice, parce qu’elle implique une assimilation aux sociétés d’exploitation « traditionnelles » doit être appréciée différemment pour l’application du régime de la TVA.

I / Animation et TVA

Sur le plan de la TVA, la notion d’animation, ou de non animation, n’est pas, à proprement parler, un critère de l’application de ce régime fiscal. L’animation est ici un constat résultant d’éléments divers et parfois communs, mais n’est pas une condition. Généralement, la holding soumise à la TVA pourra également être animatrice pour l’application de certains régimes fiscaux, mais ce n’est pas un fait acquis, et en tout état de cause ce n’est pas l’animation qui implique l’application du régime de la TVA.

D’ailleurs, considérer que, parce qu’une holding est passive (non animatrice), elle n’est de ce fait pas soumise à la TVA, est un raccourcis qui pourrait réserver quelques surprises… En effet, une holding pourrait par exemple facturer des prestations à ses filiales, sans pour autant être considérée comme une holding animatrice de groupe pour l’application d’autres régimes fiscaux, car ne répondant pas aux nombreux critères généralement admis (voir notre article : Animation des holdings et pacte DUTREIL), et notamment la participation active à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales.

En revanche, doit être mis en avant le critère « d’activité économique ». Au sens de la TVA, c’est l’existence d’une activité économique qui permet de considérer, entre autres choses, que la holding sera assujettie à la TVA. Cette activité économique doit exister entre la société holding et ses filiales.

NB : la perception de dividendes n’est pas une opération entrant dans le champ d’application de la TVA. L’activité économique devra donc se baser sur d’autres transferts de richesses intra-groupe.

L’arrêt CJUE 12/01/2017 n°28/16 permet d’illustrer ces propos :

La simple acquisition et la simple détention de parts sociales ne doivent pas être considérées comme des activités économiques au sens de la directive 2006/112, conférant à leur auteur la qualité d’assujetti. En effet, la simple prise de participations financières dans d’autres entreprises ne constitue pas une exploitation d’un bien visant à produire des recettes ayant un caractère de permanence parce que l’éventuel dividende, fruit de cette participation, résulte de la simple propriété du bien.

Il en va différemment lorsque la participation est accompagnée d’une immixtion directe ou indirecte dans la gestion des sociétés où s’est opérée la prise de participations, sans préjudice des droits que détient l’auteur des participations en sa qualité d’actionnaire ou d’associé.

À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour que l’immixtion d’une société holding dans la gestion des sociétés dans lesquelles elle a pris des participations constitue une activité économique, au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2006/112, dans la mesure où elle implique la mise en œuvre de transactions soumises à la TVA en vertu de l’article 2 de cette directive, telle que la fourniture de services administratifs, financiers, commerciaux et techniques par la société holding à ses filiales.

Il s’ensuit que la simple immixtion d’une société holding dans la gestion de ses filiales, sans la mise en œuvre de transactions soumises à la TVA en vertu de l’article 2 de la directive 2006/112, ne saurait être considérée comme une « activité économique », au sens de l’article 9, paragraphe 1, de cette directive. Partant, une telle gestion ne relève pas du champ d’application de la directive 2006/112.

En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, pendant la période en cause dans l’affaire au principal, MVM ne recevait normalement aucune rémunération de ses filiales pour sa gestion centralisée des activités du groupe. Ainsi, conformément aux considérations qui précèdent, il convient de constater que l’immixtion de MVM dans la gestion de ses filiales ne saurait être considérée comme une « activité économique », au sens de l’article 9, paragraphe 1, de la directive 2006/112, susceptible de relever du champ d’application de cette directive.

II / Notion de holding mixte et TVA

De même que la notion d’animation ou de non animation doit être écartée, ou au moins relativisée, pour l’application du régime de la TVA, la notion de holding mixte doit être considérée pour cette dernière de manière autonome, au risque de faire des confusions.

Si l’on prend l’exemple de l’application du régime fiscal DUTREIL, la holding sera mixte car :

a – Soit la société holding a une activité propre, en plus de la détention de titres de participation, et :

  • Elle exerce pour partie une activité dite « éligible » au régime fiscal DUTREIL
  • Elle exerce pour partie une activité non éligible à ce même dispositif

L’activité éligible devra alors être prépondérante.

b – Soit, la société holding a une activité d’animation de ses filiales et :

  • Elle détient pour partie des titres de participation dans une (ou plusieurs) société qu’elle anime
  • Elle détient pour partie des titres de participation dans une (ou plusieurs) société qu’elle n’anime pas

Les titres de participation animés devront être prépondérants.

En ce qui concerne la TVA, l’activité mixte est appréciée de la manière suivante :

  • La société a une activité pour laquelle elle est assujettie
  • La société a également une activité pour laquelle elle n’est pas assujettie

Que l’une ou l’autre soit prépondérante n’a pas d’importance. Le régime de la TVA (sa déduction notamment) s’appliquera en quelque sorte proportionnellement sur la quote-part de l’activité de la société pour laquelle elle est assujettie.

Comme nous le voyons, le critère de l’animation est totalement déconnecté du critère utilisé pour la TVA. Dès lors que la société a une activité économique au sens de cet impôt, elle sera assujettie. Peu importe donc qu’elle participe activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales, et que les titres de participation animés soient prépondérants.

III / Activité économique et mixité des produits perçus

Le critère de l’activité économique est volontairement large. Une même activité peut  générer plusieurs type de « revenus » différents. Par exemple, une holding animatrice peut percevoir :

  • Des dividendes de ses filiales
  • Des intérêts, par exemple d’avances en comptes courants détenus dans les filiales
  • Des produits issus de la facturation de prestations de services intra-groupe

Malgré cette diversité de « revenus », l’assujettissement de la société à la TVA ne changera pas. Si elle a une activité économique, la société y sera assujettie.

NB : Une société holding passive pourrait percevoir exactement ces mêmes « revenus » sans être animatrice. 

IV : Droit à déduction

La TVA ne sera déductible qu’en application d’un coefficient : le coefficient de taxation.

Ce coefficient sera égal à 1 si l’intégralité des biens et/ou services sont utilisés pour la réalisation d’opérations soumises à TVA. En revanche si une partie des biens et/ou services ne sont pas utilisés pour la réalisation d’opérations soumises à TVA, seule une partie de la TVA sera déductible, de manière « proportionnelle ».

Les différents revenus pris en compte ci-dessus auront un impact. Les dividendes sont, comme nous l’avons vu, hors du champ d’application de la TVA, car ne correspondent pas, en tant que tel, aux fruits d’une activité économique mais simplement aux fruits résultant de la simple propriété des parts. Ils ne seront donc pas pris en compte pour le calcul du coefficient de taxation.

Les intérêts quant à eux entrent dans le champ d’application de la TVA, mais en sont exonérés. Dès lors, proportionnellement, une partie de la TVA ne sera pas déductible : le coefficient de taxation sera impacté négativement.

Cependant, si les intérêts en question ont un caractère accessoire, alors ils n’auront pas cet impact négatif. Sont considérés comme accessoires par rapport à l’activité principale de la société (les prestations de service ici) les produits financiers qui respectent les conditions suivantes (1):

  • Les produits financiers se distinguent de l’activité principale mais présentent un lien avec cette activité
  • Les besoins de l’activité financière représentent maximum 10% de l’utilisation de la totalité des biens et services de l’entreprise

Cela étant, l’administration fiscale considère également ces produits comme accessoires dès lors qu’ils représentent moins de 5% du chiffre d’affaires de la société (2).

Dans la grande majorité des cas, une holding facturant des prestations de service à ses filiales verra son coefficient de taxation (déduction) égal à 1 (ou 100%).

En conclusion, la holding dite animatrice pourra dans certains cas déduire la TVA payée de la TVA collectée. Toutefois, le fait qu’elle soit animatrice n’est ni nécessaire, ni suffisant. Il faut qu’elle ait une activité économique, à savoir, généralement, la facturation de prestations de services aux filiales, ce qui n’est pas toujours le cas (3).


Article 256 A du CGI :

Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques (…), quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention.

Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. Est notamment considérée comme activité économique une opération comportant l’exploitation d’un bien meuble corporel ou incorporel en vue d’en retirer des recettes ayant un caractère de permanence.

(1) BOI-TVA-DED-20-10-20-20130610 n°210

Les opérations financières exonérées (il en est de même pour les produits des opérations immobilières) réalisées par une entreprise ne peuvent être qualifiées d’accessoires à l’activité principale de l’entreprise que si :

– d’une part, elles se distinguent de l’activité principale de l’entreprise et si, d’autre part, elles présentent un lien avec cette activité principale. Il en va ainsi, par exemple, des holdings mixtes qui, outre une activité industrielle, commerciale ou de services taxable, réalisent des opérations liées à la gestion financière du groupe ;

– et n’impliquent qu’une utilisation limitée au maximum à un dixième des biens et des services grevés de TVA acquis par le redevable.

(2) BOI-TVA-DED-20-10-20-20130610 n°230

En outre, la condition liée à la très faible utilisation de biens et de services grevés de TVA prévue au b du 3° du 3 du III de l’article 206 de l’annexe II au CGI est également réputée satisfaite lorsque le produit des opérations financières exonérées présentant un lien avec l’activité principale de l’entreprise, n’excède pas 5 % du montant du chiffre d’affaires total toutes taxes comprises de l’entreprise.

(3) Selon la définition de l’article 966 du CGI :

Sont également considérées comme des activités commerciales les activités de sociétés qui, outre la gestion d’un portefeuille de participations, participent activement à la conduite de la politique de leur groupe et au contrôle de leurs filiales et rendent, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers.